
Mycore
Sandra & Gaspard Bébié-Valérian se plongent dans un nouveau projet-fleuve modulaire, Mycore. Emprunt de prospective (écologie, design, biotechnologie), de mysticisme et d'autodérision, le projet Mycore propose une "remédiation" de l'humain grâce aux propriétés du règne fungi.
Cet ensemble du vivant est indispensable au monde tel que nous le connaissons. Les champignons créent de la symbiose qui facilite la végétalisation et nourrit les sols (qu'ils peuvent aussi dépolluer). Ils font respirer la planète au même titre que les forêts. Ils ont véritablement un rôle de transformation et de communication (réseau moléculaire du mycélium), . Aujourd'hui, ils font l'objet de recherches en innovation agricole et en renouvellement durable, mais l'humain, sur tous les continents, les vénère déjà depuis longtemps pour leurs propriétés psychotropes, véhicules vers un monde caché.
À l'heure où il nous faut imaginer le futur avec les contraintes annoncées d'une limitation de nos ressources et d'une dégradation des écosystèmes, Mycore laisse envisager, par la fiction et la convocation de croyances empruntées ou imaginaires, des pistes pour une transformation de l'humain.
Mycore est actuellement en cours de recherche et a fait l'objet de trois résidences : à Rua Red (Dublin, septembre 2018), aux Ensembles 2.2 (Strasbourg, septembre 2018), au Shadok (Strasbourg, février 2019). La première étape a particulièrement été axée sur la symbiosis du champignon via son réseau micellaire. Prélèvements in situ, expériences d'écoute et relevés des signaux électriques, le travail s'est d'abord fait en pleine nature. De l'extérieur à l'intérieur : savons-nous écouter et que pouvons-nous comprendre des propriétés symbiotiques du champignon ? Comment les ramener dans le domaine de l'humain, dans sa maison ? La réponse a été trouvée dans le kombucha, un champignon-mère qui se développe en transformant du thé sucré en boisson fermentée particulièrement bonne pour la santé. La culture de kombucha est entourée d'une éthique du partage et de nombreuses communautés se sont développées pour échanger et expérimenter, faisant du symbiote l'objet de multiples attentions.
Le deuxième temps de résidence, aux Ensembles 2.2, a donné plus de place à la construction d'un mythe et au questionnement de la cohérence de l'ensemble des modules. Des protocoles d'expériences et l'idée d'une performance ont émergé avant un retour en atelier pour une première étape de mise en culture et de création des premiers artefacts comme appareils communicants.
La troisième étape au Shadok, dans le cadre de "Hier, c'était demain : science-fiction et imaginaires collectifs", est l'occasion de mettre à profit le Physarum Polycephalum, qui n'est pas un champignon mais un myxomicète, plus ancien que le champignon, autrement connu sous le doux nom de BLOB ! Nous aurons l'occasion de développer la description du projet au fil de ces prochains mois et de découvrir quel rôle sera attribué à cet organisme intelligent.
Cette nouvelle aventure qui commence avec Mycore n'est pas sans rappeler Viridis, mais est à mettre en perspective avec notre cycle de recherche Autorama. Comment un projet modulaire peut-il faire exposition en lui-même ? Comment maintenir du vivant dans un artefact en automatisant l'entretien de son milieu de culture ? Comment concilier des temporalités différentes entre monstration et développement naturel des éléments vivants intégrés au projet ?